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Alain Montesse

U.S.S.

Alain Montesse, automne 1970
durée: environ 26'
original 16mm inversible couleur double-bande;
1 copie 16 mm son magnétique piste couchée (COMMAG)
1 copie 16 mm double-bande (SEPMAG)


Il s'agit là de mon premier film, du premier que j'aie achevé seul. Et, j'en ai bien peur, du meilleur, ou du plus achevé, que j'aie jamais fait. Et à coup sûr du plus séduisant. D'ailleurs, il est fait pour cela.

Le titre signifie UNSANITY'S SPECULUM. Le terme « Unsanity » est emprunté à Korzybski, et signifie "ce qui n'a rien à voir avec la santé"; il ne faut donc pas confondre avec « insanity ». Le titre entier fait référence au Miroir De La Magie, de Kurt Seligman (je ne sortais que depuis peu du surréalisme, à l'époque)...

La plupart des éléments-image furent tournés entre janvier et juin 1970, et le reste durant le mois d'août (le mois de juillet avait été occupé par l'opération du Pyla). Bien évidemment, ce tournage ininterrompu s'effectuait dans le mouvement de la vie quotidienne, sans projet de film particulier. Les superpositions étaient effectuées directement dans la caméra, conformément à l'usage de l'époque. Mais lorsque, à l'automne 1970, je me trouvai dans l'impossibilité mentale de monter le film du Pyla, et dans l'obligation (?) de fournir à l'IDHEC un film de fin d'études, je résolus de monter ce stock d'images à proprement parler insignifiantes, sur des extraits plus ou moins remaniés, principalement de la Société du Spectacle mais aussi d'autres textes, et sur des musiques que nous écoutions beaucoup à l'époque. Il s'agissait pour moi de condenser en un seul film nos expériences "hippies" d'un côté et pro-situationnistes de l'autre (les deux espèces n'ont jamais fait très bon ménage). C'était une gageure, je crois ne pas m'en être trop mal tiré.

USS est construit en 5 parties, comme la Symphonie Fantastique et/ou le Cuirassé Potemkine - ou n'importe quelle pièce classique en 5 actes. Peut-être s'agit-il là d'une réminiscence inconsciente, je n'en sais rien, je ne m'en suis aperçu que bien des années après. Il serait en tout cas amusant de le remonter sur les musiques de Berlioz ou Jean-Etienne Marie (il faudrait sans doute parfois plutôt remonter la musique sur l'image...).

Ces 5 parties se subdivisent en sous-parties, qui sont autant de matrices musicales passées in-extenso:

I.-
> xxx (Spirit)
>> Danse de la Terre (Sacre du Printemps, Stravinsky)
>>> Bateliers de la Volga (Jefferson Airplane)
>>>> Volunteers (Jefferson Airplane) ;
II.-
> Laborinthus (Berio)
>> (silence ---> bruitage)
>>> Marche sur la Drina (Ingmann) ;
III.-
> L'Hiver (part I, Vivaldi) + chant folklorique d'Azerbaïdjan + (à la limite de l'inaudible): "Le temps a laissé son manteau ..." (Polnareff - Charles d'Orléans) ;
IV.-
> Instant Karma (Lennon)
>> Nagula (Myriam Makeba)
>>> Rejoyce (Grace Slick) + Parthenogenesis (Canned Heat) + Wozzeck (mort de Wozzeck + grand accord en Si de la mort de Marie, Berg) ;
V.-
> Subterranean Homesick Blues (Dylan)
>> Danse de la Terre à nouveau + Lizza del Apuane + fin de The Man On The Flying Trapeze (Les Paul) .

Bien sûr, toutes ces musiques furent choisies au pifomètre, par tâtonnements et essais-erreurs, en ne retenant que les alliages images-musiques qui apparaissent les plus satisfaisants et les plus expressifs quant aux climats instaurés. Les textes furent choisis, un peu ré-écrits et montés seulement ensuite, après que le montage images-musiques ait été à peu près achevé. Ils sont très souvent immergés dans la musique, qui parfois les recouvre complètement; leur fonction est d'apporter, en temps réel, la théorie de ce que l'on voit et entend. Mais comme on sait, il est difficile de percevoir et théoriser en même temps, on est souvent contraint de choisir. Les bruitages sont rares, et non réalistes.